Deux ouvrages d’Henri Michaux, "L’infini Turbulent" et "Connaissance par les gouffres" sont à l’origine de ce projet. Les expériences menées par Michaux autour de substances psychotropes posent profondément la question de notre perception de la réalité et de notre capacité à nous en satisfaire. Lorsque Michaux glisse dans les mondes hallucinés, il nous livre de ses expérimentations une somme d’alternatives qui ne peuvent nous laisser indifférents. Car si nous sommes prétendument libres dans notre civilisation, libres soi-disant de percevoir le monde, ne serait-ce pas le contraire qui s’opère ?
Tous logés à la même enseigne d’une vie ultra numérisée, pilotée par les réseaux sociaux, les séries télévisées, les jeux vidéos, nous remplaçons peu à peu l’expérience du réel par une profusion constante des images. En réalité, le système dans lequel nous vivons nous impose de plus en plus de restrictions, surveille, analyse et traite nos moindres faits et gestes. Dans cette joyeuse consommation généralisée de nos propres images, que reste t’il du réel ?
L’hallucination, telle que Michaux nous la livre, semble finalement autrement plus stimulante que cet état de dépendance que nous imposent les réseaux.
« L’hallucination est infiniment plus vraie que la vue de l’ordinaire réalité. La réalité, étant formée d’éléments et d’impressions contradictoires, est douteuse, divertissante, fragmentaire. Elle distrait. On la constate - (comme obstacle surtout). L’hallucination, elle, admirablement synergique, synthétique, « d’ensemble », correspondant parfaitement, sans bavure, sans trop ni trop peu, à l’image intérieure, ne peut être mise en doute, en question. — ADÉQUATE. »
Henri Michaux, l’Infini turbulent